Blog L’Arbre

Aujourd’hui, il s’est échoué en bas de chez moi.

Je jetai un œil par la fenêtre et je le vis, immense, tordu, frappé par les vagues qui le poussaient vers le rivage. Immédiatement, j’eus besoin d’aller le voir.

Il était pris dans les flots, claqué par la marée montante. Il faisait bien 20 mètres. Il y avait tant de puissance dans ce moment. Les humains faisaient leurs affaires, pêchaient et flânaient sur la côte mais tous eurent un regard pour ce géant noyé. La houle, minute après minute, tentait de toute sa force de le recracher sur le rivage.

Le lendemain, la mer s’était retirée et il gisait là, détruit et englué dans le sable mouillé.

On aurait dit une carcasse de créature marine. Je m’approchai doucement, je n’osais pas le toucher. Je profitais de chaque instant et contemplais ce naufragé qui n’était à présent qu’un tas de bois en charpie, prisonnier des algues, l’écorce déchiquetée par son voyage en mer. D’où venait-il ? Combien de kilomètres avait-il parcourus avant de s’échouer ici ? Je remarquai des traces de brûlures à la base de ses racines.

Des hommes s’approchèrent et commencèrent à le débiter à la tronçonneuse. Ils coupèrent une à une ses énormes branches et en firent un tas dans la vase. Je trouvais ça aussi violent que fascinant. L’odeur de sève se mêlait aux embruns. Un tracteur faisait l’aller-retour entre la Bête et la route, les passants suivaient ce manège, le regard dans le vide, pensifs.

À quoi cela faisait-il écho ? La fin brutale d’un être qui a mis des années à grandir, l’inévitable fin qui nous attend tous, la paix ?

À midi, l’Arbre avait disparu et je me souviendrai toute ma vie de lui.

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